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L’homme au képi

L’homme au képi

En 2001, je me suis rendu à Kampala pour solliciter un visa à l’ambassade des États-Unis. Dans la capitale ougandaise j’avais rejoint ma patronne et son assistant qui, tous les deux, devaient se rendre au Zimbabwe le lendemain.

Nous nous sommes rendus ensemble au Metropolitan Forex Bureau par lequel nous parvenaient nos fonds. Le Metro Forex faisait partie d’un complexe commercial que le gouvernement Ougandais avait restitué à ses propriétaires Indiens dépossédés par le régime d’Idi Amin.

Nous étions quatre en tout puisqu’un autre collègue -décédé l’année suivante- s’était joint à nous. Après avoir rencontré les responsables du Metro Forex, nous nous sommes installés à l’une des terrasses du complexe. La terrasse n’était pas vide. J’ai tout de suite reconnu quelques caciques du Mouvement de Libération du Congo (MLC). Et pas des moindres ! Point n’est besoin de revenir sur les accointances qui existaient alors entre ce Mouvement et le Gouvernement Ougandais.

Les membres du MLC se trouvaient juste derrière nous. Nous parlions de choses et d’autres avant d’aborder la question du voyage que devaient effectuer ma patronne et son assistant au Zimbabwe. Ils étaient invités à une conférence. Un moment donné j’ai vu un des responsables du MLC s’éloigner de la terrasse et parler au téléphone. Puis, sans qu’on s’en rende compte, ils ont tous disparu. Nous nous sommes retrouvés seuls à la terrasse.

Au bout de je ne sais plus combien de temps l’un d’entre nous s’en est allé. Puis c’est l’assistant de ma patronne qui est parti. Je me suis donc retrouvé seul avec elle. Nous avons fini par lever l’ancre. Alors que nous nous dirigions vers la sortie du complexe, un homme a tenté d’arrêter ma patronne. Elle s’est tournée vers moi et je lui ai fait signe de poursuivre son chemin. C’est alors que le quidam a ouvert l’un des pans de sa veste. Il était armé ! Il n’en fallait pas plus pour que je fasse demi-tour, invitant, par la même occasion, ma patronne à faire de même. Ils étaient deux et appartenaient à une unité spéciale de la police.

L’un d’entre eux nous a dit que d’autres policiers allaient les rejoindre. Nous sommes donc retournés à notre table entourés de cinq ou six policiers en civil. Au fur et à mesure qu’ils nous interrogeaient ils examinaient nos documents. Les passants imaginaient sans doute qu’un groupe d’amis tenait une réunion…et pourtant. Quand ils ont réalisé que nous n’étions que des scientifiques, leur nervosité a baissé d’un cran. Nous étions loin de comprendre ce qu’ils nous voulaient. A la fin de leur contrôle l’un d’entre eux a dit « ou est l’homme au képi ? »

L’homme au képi n’était personne d’autre que le collègue de notre groupe qui était parti le premier. Mais comment savaient-ils que l’un d’entre nous avait un képi ? J’ai alors compris pourquoi l’un de nos voisins de terrasse s’était isolé pour téléphoner et pourquoi ses collègues, et lui-même, avaient filé à l’anglaise.

La raison de notre interpellation est facile à deviner. Comme nous parlions du Zimbabwe, les responsables du MLC nous avaient pris pour des espions à la solde du gouvernement congolais dont le Zimbabwe était l’allié.

Je me suis souvent demandé ce qui serait arrivé si ma patronne n’était pas une citoyenne américaine. Qu’est-ce qui serait arrivé si elle était partie la première, avant l’arrivée de la police ?

L’homme au képi

En 2001, je me suis rendu à Kampala pour solliciter un visa à l’ambassade des États-Unis. Dans la capitale ougandaise j’avais rejoint ma patronne et son assistant qui, tous les deux, devaient se rendre au Zimbabwe le lendemain.

Nous nous sommes rendus ensemble au Metropolitan Forex Bureau par lequel nous parvenaient nos fonds. Le Metro Forex faisait partie d’un complexe commercial que le gouvernement Ougandais avait restitué à ses propriétaires Indiens dépossédés par le régime d’Idi Amin.

Nous étions quatre en tout puisqu’un autre collègue -décédé l’année suivante- s’était joint à nous. Après avoir rencontré les responsables du Metro Forex, nous nous sommes installés à l’une des terrasses du complexe. La terrasse n’était pas vide. J’ai tout de suite reconnu quelques caciques du Mouvement de Libération du Congo (MLC). Et pas des moindres ! Point n’est besoin de revenir sur les accointances qui existaient alors entre ce Mouvement et le Gouvernement Ougandais.

Les membres du MLC se trouvaient juste derrière nous. Nous parlions de choses et d’autres avant d’aborder la question du voyage que devaient effectuer ma patronne et son assistant au Zimbabwe. Ils étaient invités à une conférence. Un moment donné j’ai vu un des responsables du MLC s’éloigner de la terrasse et parler au téléphone. Puis, sans qu’on s’en rende compte, ils ont tous disparu. Nous nous sommes retrouvés seuls à la terrasse.

Au bout de je ne sais plus combien de temps l’un d’entre nous s’en est allé. Puis c’est l’assistant de ma patronne qui est parti. Je me suis donc retrouvé seul avec elle. Nous avons fini par lever l’ancre. Alors que nous nous dirigions vers la sortie du complexe, un homme a tenté d’arrêter ma patronne. Elle s’est tournée vers moi et je lui ai fait signe de poursuivre son chemin. C’est alors que le quidam a ouvert l’un des pans de sa veste. Il était armé ! Il n’en fallait pas plus pour que je fasse demi-tour, invitant, par la même occasion, ma patronne à faire de même. Ils étaient deux et appartenaient à une unité spéciale de la police.

L’un d’entre eux nous a dit que d’autres policiers allaient les rejoindre. Nous sommes donc retournés à notre table entourés de cinq ou six policiers en civil. Au fur et à mesure qu’ils nous interrogeaient ils examinaient nos documents. Les passants imaginaient sans doute qu’un groupe d’amis tenait une réunion…et pourtant. Quand ils ont réalisé que nous n’étions que des scientifiques, leur nervosité a baissé d’un cran. Nous étions loin de comprendre ce qu’ils nous voulaient. A la fin de leur contrôle l’un d’entre eux a dit « ou est l’homme au képi ? »

L’homme au képi n’était personne d’autre que le collègue de notre groupe qui était parti le premier. Mais comment savaient-ils que l’un d’entre nous avait un képi ? J’ai alors compris pourquoi l’un de nos voisins de terrasse s’était isolé pour téléphoner et pourquoi ses collègues, et lui-même, avaient filé à l’anglaise.

La raison de notre interpellation est facile à deviner. Comme nous parlions du Zimbabwe, les responsables du MLC nous avaient pris pour des espions à la solde du gouvernement congolais dont le Zimbabwe était l’allié.

Je me suis souvent demandé ce qui serait arrivé si ma patronne n’était pas une citoyenne américaine. Qu’est-ce qui serait arrivé si elle était partie la première, avant l’arrivée de la police ?

SigPour la chronique.Richard Tshombe,intellectuel congolais, analyste indépendant et entrepreneur

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