Joe Biden en Angola : Dernier baroud ou ultime grain de sable de la Maison Blanche en Afrique centrale?

Éditorial de politique générale.

Diplomatie et politique régionale.

La présence, en fin de mandat, du président de la plus grande puissance du monde, en Afrique centrale, surprend à un point qui inquiète et fait réfléchir à la fois de nombreux analystes. Joe Biden, d’entrée de jeu, a mal joué sa carte dans l’opinion des africains qui redoutent cet intérêt brutal et très démonstratif des États-Unis d’Amérique pour le projet du corridor de Lobito situé entre la RDC et l’Angola.

Pourquoi avoir attendu la fin de son mandat pour descendre en personne sur place et réactiver, par la même occasion, un tête-à-tête forcé entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame sous l’arbitrage de Joao Lourenço ?!

C’est étrange et assez suspect pour l’avenir et les perspectives de cet important projet dont les bénéfices, selon toute apparence, devraient constituer un levier essentiel pour l’économie régionale or, ce qui ne se dit pas résulte de savoir à qui tous ces avantages vont profiter ?

La réponse à cette question fondamentale représente le poids mondial de ce projet classé et vieux de plus de 50 ans qui ressuscite très rapidement, par les vœux de quelques volontés étrangères qui piétinent le sort des africains, seuls véritables concernés. Seule l’histoire peut témoigner de tout ce qui a été fait et défait dans cette partie de l’Afrique, cela depuis ?

Des africains connus ( Mobutu, Savimbi, Dos Santos,…) et inconnus( les victimes de la longue guerre Unita- MPLA) y ont consacré et perdu la vie, des entreprises ( La SNCC, la Gecamines, …) et des espoirs se sont éteints pour ce corridor dont l’enjeu, en vérité, est de favoriser l’évacuation des minerais de la RDC jusqu’à l’océan Atlantique et Pacifique via le chemin de fer de Benguela connecté à celui de Kolwezi, le grenier des matières recherchées et convoitées. Les choses deviennent un peu plus claires, à ce stade.

C’est en fait le véritable enjeu pour les puissances hégémoniques que de contrôler ces gisements stratégiques de la source à l’exploitation totale et exclusive.

Ce qu’il faut savoir est que cette infrastructure ferroviaire de grande envergure visant à relier le potentiel du grand Katanga et de toute la RDC au port de Lobito, pour l’évacuer et l’apporter, via les océans Atlantique et Pacifique, aux marchés américain et européen, détourne de l’ancienne voie du sud, celle de Kasumbalesa – Zambie – RSA, allant vers l’océan Indien, à destination de l’Asie, donc en défaveur des marchés de la Chine, de l’URSS, de la Corée du Nord et des Émirats arabes.

C’est un coup dur et cynique contre les alliances des pays du  » Brics », auxquels on freiné l’élan.
Ce qui fait mal est que l’ordre des priorités ne profite pas à la RDC qui traverse encore d’énormes retards quant à la stabilité de sa souveraineté et de son administration. Les infrastructures sont obsolètes et insuffisantes pour intégrer ce projet salutaire convenablement. Ça ressemblerait à inviter à un dîner dans un restaurant luxueux, un pauvre qui ne sait pas se servir des couverts!

Faudra-t-il qu’il se serve de ses mains pour manger alors que les seules dispositions et convenances se limitent à des couteaux, fourchettes et cuillères dont l’usage lui échappent encore !

C’est dire que les USA et alliés européens devraient pacifier, avant tout, la RDC en facilitant une émergence économique inclusive susceptible de permettre aux intérêts congolais de s’épanouir et se relever aux niveaux de ces voisins nettement plus avancés, cas de l’Angola et de la Zambie, de la Tanzanie.

Et pourtant, ce débouché de Lobito n’est pas une nouveauté pour les congolais des premières années post-independance parce tous les acteurs, à l’origine de sa destruction, à savoir : les jeunes révolutionnaires fondateurs Roberto Holden, Jonas Savimbi, Édouard Agostino Neto jusqu’à Dos Santos,

tous avaient été des réfugiés qui ont fait carrière au Congo Belge et au Zaïre, avant de se trahir, par la suite, les uns les autres pour l’Angola indépendante.

Conclusion. La République démocratique du Congo a besoin d’assainir toute son administration et d’ajuster sa compétitivité pour mieux fixer son développement, sinon, on court le risque réel d’échouer de tirer profit de cette inestimable ouverture économique faute de bonne gouvernance, d’insécurité territoriale et d’irrégularités institutionnelles.

Nous n’avons plus d’industries locales et nationales dignes de ce nom vu que des individus et des particuliers cannibalisent les droits de l’État et du trésor public au détriment du peuple.
Bref, la République démocratique du Congo ne dispose d’aucune garantie actuellement pour prétendre à des meilleurs lendemains dès que ce corridor va se mettre en branle.

Ainsi, la venue de Joe Biden et l’influence qu’il exerce pour réconcilier la RDC avec le Rwanda ne sont pas, franchement, de bonne augure, plus pour les congolais.
L’avenir nous le dira.

Guy ILUNGA KABAMBA.